Suite ...
Biquet
Nom d’origine : Négus. Surnoms : grand Biquet, Folcoche,
Gromico, Mickey, Papic, Papikiniou, Tictic etc… 1970
Grand Chat noir : Le Chat. Un adjectif le
caractérisant : gentil. Il a réconcilié tout son environnement humain (voisins, famille, amis) avec la gent féline.
Nous habitions Nantes. Un matin, comme j’ouvrais la porte d’entrée de l’appartement, une
tornade noire se faufila à toute vitesse entre mes jambes et alla se cacher dans le placard à vêtements de Patricia. Impossible de le faire sortir. Il a fallu que j’attende que Monsieur veuille
bien sortir. Quand il a montré son nez, nous étions aussi surpris l’un que l’autre. Qui j’étais ? D’où il venait ? A qui il appartenait ? Comme toujours, réaction immédiate :
As-tu faim ? Evidemment ! bon ! à la soupe. Et la suite, on s’en doute, le logement, bien que petit lui plaisait beaucoup. Mais es-tu chat ou chatte, hum ! Apparemment, après examen rapide, tu es une fille. Très sociable, douce, câline encore un peu bébé. Mais voilà, il était question pour nous de déménager. Ma
conscience me forçait à retrouver ses maîtres, mon cœur me disait de n’en rien faire. Après quelques temps, je rencontrai sous le porche à l’entrée du vieil immeuble, un monsieur me disant savoir
que j’avais hébergé un chat noir, il lui appartenait et m’a demandé si je ne pouvais pas le garder. Le vieil immeuble où il habitait étant frappé d’alignement, il devait partir et malade, aller
en sanatorium avec son amie, vrai ou faux ? Toujours est-il qu’il a joué sur la corde sensible et j’ai gardé mon Biquet avec moi. En fait, c’était un mâle castré (aux abattoirs de
Nantes !) âgé d’un an. Il s’appelait Négus car il était noir ; nous l’avions surnommé Folcoche car il sentait le tabac et nous pensions qu’il appartenait à une voisine célibataire qui
fumait à bloc et que nous avions surnommée Folcoche à cause de son caractère non sociable. Donc, Biquet resta avec nous. Juste avant de déménager, notre petite Pupuce est arrivée, toute noire
elle aussi avec un copain siamois. Et voilà, tout d’un coup, la famille agrandie. Après tout, nous allions dans une grande maison avec un jardin. C’était une vraie folie, dans l’appartement
encombré de cartons. C’était chacun son tour, pour se cacher dans, dessus, derrière ces cartons, un vrai régal pour nous trois. Le Siamois, était plus discret.
Patricia allait à l’école tout près de chez nous. Elle m’affirma qu’un jour elle le vit dans
la cour entouré d’un groupe d’enfants, il se faisait caresser. Il était facile pour lui de pénétrer dans cette école, il passait à travers « la cour des miracles ». Nous, nous faisions
le tour par les rues et souvent nous ramenions la fille accompagnée de son chat. Il n’avait pas peur de la circulation et marchait près de nous comme un petit chien.
Quand nous sommes arrivés à St Sébastien, le froid ayant rapproché mes trois lascars, mais
l’inconnu les effrayant un peu, alors nous les voyions à la queue leu leu, partir de chez nous et visiter le secteur, Biquet en tête suivi de Pupuce, noire elle aussi, et de Toto le Siamois. Au
grand désespoir de nos vieux voisins car le terrain n’était pas clôturé «dis, viens voir, il y en a
trois ! ! ». La clôture a été rapidement faite, mais notre puce qui était l’agilité même avait pris ça comme un jeu : elle prenait un bon élan, et fonçait par-dessus le
grillage les quatre pattes en éventail. On l’avait surnommée la gerboise tant elle était fine.
Notre grand Biquet, faisait l’admiration de tout le monde. Il était très grand et puissant.
Sa fourrure était d’un noir d’ébène, lumineuse, soyeuse et lustrée. Quand on le rencontrait dans le jardin, on avait l’impression qu’il revenait du toilettage, tellement il était tiré à quatre
épingles. Il était élégant, beau, fascinant.
Il était très grand. Son plaisir était de se coucher sur le dos et dès qu’il nous voyait, il
allongeait ses pattes avant et arrière au maximum jusqu’à ce qu’il nous entende dire : « Oh ! qu’il est grand ! » et que
nous prenions un mètre pour le mesurer.
Il était très gentil, doux, câlin et docile. Patricia l’habillait avec des vêtements qu’elle avait quand elle était bébé. Il adorait ça. Il était joueur, coquin, très
sociable. Cela ne le gênait pas d’aller rendre visite aux voisins, qui l’acceptaient bien car c’était un grand chasseur, il a dératisé tout le quartier. Un jour, Pupuce est entrée dans la maison.
Nous avions des invités. Elle avait un rat dans la gueule et nous en a fait cadeau. Biquet n’a pas voulu être en reste, cinq minutes après il revenait lui aussi avec le même présent. C’était le
branle-bas de combat, il fallait vérifier si les petites bêtes étaient vivantes ou mortes, pour éviter qu’elles ne souffrent. Je ne compte plus le nombre de fois où nous avons remis en liberté
ces pauvres créatures.
J’ai déjà dit que Patricia aimait l’habiller. Une fois son copain déguisé, elle le déposait
dans un panier, maintenait celui-ci sur le porte-bagages de son vélo et s’en allait en balade dans le quartier, notre Biquet tout heureux faisant semblant de dormir.
Biquet était considéré comme le chef de file. Comme il s’absentait rarement, (il ne partait
jamais longtemps), j’attendais qu’il soit là pour donner à manger à tout le monde, la chienne y compris. Il était gourmand mais pas voleur, il ne griffait jamais. C’était un grand ronronneur, il
dormait toujours avec nous la nuit, surtout avec Patricia. Il avait dû être sevré trop tôt, et suçait tout le linge doux qu’il trouvait, il « patinait » dessus et le tétait. Quand il
dormait avec Patricia, il s’attaquait à sa chemise de nuit. Il a fallu la sacrifier et la lui réserver ; c’était son « tète-suce »
comme l’appelait Patricia qui était encore petite. Biquet n’est plus depuis longtemps mais le tête-suce est toujours là.
Il aimait les humains mais aussi ses congénères, il n’était pas rare de le voir faire la
toilette même des autres chats voisins, n’importe où, et jusque sur le milieu de la route. Un jour, une des chattes a attiré plusieurs chats du quartier dans le jardin, et notre Biquet qui ne
comprenait rien pensait que c’était pour jouer ; il s’est retrouvé sur le dos avec un copain à califourchon sur lui, lui, pensant que c’était pour jouer, l’autre le prenant pour une chatte
un peu bizarre.
Il avait deux maisons, chez nous et chez mes beaux-parents au bout du jardin. Il faisait la
sieste avec grand-père, affalé sur sa poitrine. Il était pourtant très lourd, mais on ne pouvait pas le repousser. Ce chat était une exception. Il nous suivait comme un petit chien. Quand il y
avait des restes à la fin des repas, Grand-père appelait Biquet en tapant dehors avec une cuillère sur le bord d’une assiette ; notre grand chat comprenait le message et se précipitait à
toute vitesse dans le fond du jardin.
En 1978, il avait à peu près huit ans, on a remarqué qu’il avait moins d’entrain, son poil
n’était pas beau. Le vétérinaire lui a fait une prise de sang, il avait un taux d’urée important, il n’y avait pas grand-chose à faire. En novembre j’ai été hospitalisée, pour un problème
thyroïdien. En revenant à la maison, j’avais un beau cadeau, une belle chatte grise m’attendait, Nénette. Mais mon Biquet n’allait pas mieux. Il est parti pendant trois jours, puis il est revenu
encore plus affaibli. J’ai décidé de l’emmener le soir même chez le vétérinaire, malheureusement il m’a échappé et nous ne l’avons plus revu. Il avait dû sombrer dans une sorte de coma léger
pendant trois jours puis il était revenu nous dire adieu à sa façon, et a fait de même chez mes beaux-parents. Nous avons fait tout le quartier, personne ne l’avait vu. Ce fut une grande perte
pour nous. Il n’a pas voulu nous montrer sa déchéance et a préféré partir, seul. Nous gardons un souvenir inoubliable de ce chat, je le répète, c’était Le Chat, qui plus est, un chat noir. Nous
étions en adoration devant lui. Depuis Biquet, j’ai toujours eu un chat noir à la maison. Comme nombre de félinophiles, j’ai un faible pour ceux dont
le pelage est de velours noir avec comme seuls repères deux immenses yeux cuivrés ou verts, quand ils veulent bien nous les laisser entrevoir. Pour nous c’est un porte-bonheur. Qui allait prendre
la suite ? Et bien c’est tout trouvé. Ati, la petite chatte noire qui avait élu domicile chez nous, trois ans plus tôt, et qui était très discrète. Elle a été notre compagne pendant
vingt-deux ans.
On avait surnommé Biquet « Tictic » car avec l’âge ses griffes n’étaient plus
rétractiles, et quand il marchait sur le carrelage, on le reconnaissait, il faisait un petit bruit particulier.
à suivre ...